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Acheter un bien occupé : bonne affaire ou fausse économie ?

Publié le 26/05/2025

Acheter un logement déjà occupé, par un locataire ou un occupant sans droit, peut être tentant. La promesse d’un prix plus bas et d’un revenu immédiat attire surtout dans un marché tendu. Mais derrière cette apparente bonne affaire, les pièges sont nombreux. Ce guide complet vous aide à y voir clair, à éviter les erreurs coûteuses, et à décider si ce type d’acquisition est adapté à votre stratégie immobilière.

Comprendre ce qu’est un bien occupé

Définition et principe juridique

Un bien est considéré comme occupé lorsqu’il est vendu alors qu’un locataire y réside. L’acheteur reprend alors le contrat de location en cours. Cette continuité juridique est automatique : vous ne pouvez pas modifier les conditions du bail, ni exiger le départ immédiat du locataire.

Cela signifie également que vous devez attendre l’échéance du bail pour éventuellement délivrer un congé, sous des conditions strictes.

Reprise du bail en l’état

Le contrat de bail est transféré tel quel : loyer, charges, durée restante, dépôt de garantie. Le nouvel acquéreur devient bailleur à la place de l’ancien propriétaire, avec les mêmes obligations et limitations. C’est un principe fondamental de la protection du locataire en droit français.

Et si le bien est occupé sans droit ni titre ?

Il ne s’agit plus d’un simple achat locatif, mais d’une situation conflictuelle. Le processus d’expulsion peut durer plusieurs mois (voire années), surtout si l’occupant est protégé ou en situation précaire. Ce type d’achat est très risqué, réservé aux professionnels de l’immobilier ou aux marchands de biens aguerris.

Ce que dit la loi : obligations et droits de l’acheteur

Législation en vigueur (Loi ALUR)

La loi ALUR encadre fermement les droits du nouveau propriétaire. Si vous souhaitez donner congé pour vendre ou pour habiter, il vous faudra respecter des délais précis après l’achat : 

  • 3 ans pour un congé pour vente,

  • 2 ans pour un congé pour reprise personnelle.

Ces délais sont impératifs, sauf en cas de fin naturelle du bail à court terme.

Location vide vs meublée : ce que ça change

Un logement loué vide est soumis à un bail de 3 ans renouvelable (ou 6 ans si le bailleur est une personne morale). La procédure de congé y est plus rigide. En revanche, une location meublée permet un bail d’un an renouvelable, ce qui facilite une reprise rapide du logement.

Le choix du type de location influe donc directement sur votre souplesse de gestion et vos perspectives de valorisation.

Pourquoi acheter un bien occupé ?

Une décote à l’achat

Le principal attrait réside dans le prix. Un bien occupé est souvent vendu avec une décote de 10 à 30 %, voire plus dans certains cas. Cette réduction s’explique par l’absence de jouissance immédiate du bien et les contraintes juridiques qui y sont liées.

Des revenus locatifs immédiats

Dès la signature de l’acte authentique, vous percevez les loyers. Il n’y a ni vacance locative ni travaux de remise en état à court terme. Cette rente immédiate rassure beaucoup d’investisseurs débutants.

Une stabilité locative parfois illusoire

Un locataire en place depuis plusieurs années peut garantir une certaine régularité. Mais attention : un loyer gelé ou très inférieur au marché, ou un locataire âgé ou protégé, peut geler vos marges de manœuvres pour plusieurs années.

Les risques souvent sous-estimés

Loyer sous-évalué et rentabilité réelle

Beaucoup de biens sont loués à des loyers inférieurs au marché, parfois de 20 à 40 %. Si le bail est ancien et que les revalorisations n’ont pas été appliquées, le rendement réel chute. Il faut comparer le loyer actuel au loyer de marché pour juger de la pertinence de l’opération.

Revente bloquée et manque de flexibilité

Tant que le locataire est en place, le bien est plus difficile à revendre, sauf à un autre investisseur. Cela complique la revente à un acquéreur non investisseur et réduit vos options de transformation ou valorisation. Vous ne pouvez pas non plus rénover ou transformer le logement tant qu’il est occupé.

Profil du locataire inconnu ou risqué

Vous héritez du locataire, sans avoir eu l’occasion de le choisir. S’il est peu fiable ou en contentieux, vous en subissez les conséquences. Il est donc vital de vérifier son historique et sa régularité de paiement.

Ce qu’il faut absolument vérifier avant d’acheter

Documents à obtenir 

Avant de signer, exigez : 

  • Le bail en cours (original),

  • Les 3 dernières quittances de loyer,

  • L’attestation de dépôt de garantie,

  • Un extrait de compte locataire (si possible),

  • Le règlement de copropriété,

  • Les diagnostics techniques obligatoires.

Analyse du bail et des clauses spécifiques

Observez : 

  • La durée restante du bail,

  • La date d’entrée dans les lieux,

  • Le montant du loyer et des charges,

  • Les éventuelles clauses particulières (renouvellement automatique, clause résolutoire…)

Historique de paiement du locataire

Un extrait de compte locataire est essentiel pour identifier les retards de paiement, les éventuels litiges, ou une régularité rassurante. Ce document permet de mesurer la fiabilité locative et donc la solidité de votre revenu.

Fiscalité et cadre juridique selon le type de bail

Revenus fonciers vs LMNP

  • Location vide : vous êtes imposé au régime des revenus fonciers, souvent moins avantageux.

  • Location meublée : vous pouvez opter pour le régime LMNP, permettant l’amortissement du bien et la déduction des charges.

La fiscalité doit être anticipée, surtout si le rendement est faible ou si vous avez d’autres revenus locatifs.

Potentiel de revalorisation du loyer

Un bail meublé permet des réajustements plus fréquents. Si le bien est sous-loué par rapport au marché, un potentiel de revalorisation existe à moyen terme. Cela peut justifier un achat stratégique, même avec une rentabilité initiale modérée.

Stratégie patrimoniale : pour qui ce type d’achat est adapté ?

Investisseur long terme

Ce profil peut attendre la fin du bail, et valoriser le bien à échéance. Il vise une plus-value différée, généralement accompagnée de revenus locatifs stables.

Acquéreur pour usage personnel

Très peu conseillé. Les contraintes sont fortes et les délais longs pour habiter le logement. À éviter sauf cas spécifique.

Investisseur débutant

Séduisant, mais trompeur. Ce type d’achat paraît rassurant, mais nécessite une analyse fine des risques. À réserver à ceux qui se sont bien documentés et accompagnés.

L’achat d’un logement occupé n’est pas à prendre à la légère. C’est une opération à double tranchant. Elle peut offrir une décote et un revenu immédiat, ou se transformer en source d’ennuis juridiques et fiscaux si elle est mal anticipée. Ce type d’achat est adapté aux investisseurs patients et bien informés, capables d’évaluer précisément le rapport entre prix, rentabilité et contraintes juridiques.

Avant de vous lancer, faites-vous accompagner d’un expert immobilier ou d’un avocat spécialisé en droit locatif. Vérifiez chaque document, analysez la rentabilité réelle et n’achetez jamais sans avoir comparé avec un bien libre équivalent.