Vendre un logement peut déclencher une plus-value immobilière : la différence entre le prix de cession et le prix d’acquisition corrigé. Cette plus-value, lorsqu’elle n’est pas exonérée, est imposée à 36,2 % (19 % d’impôt sur le revenu + 17,2 % de prélèvements sociaux) auxquels s’ajoute, le cas échéant, une surtaxe pour les gains supérieurs à 50 000 €.
Pour éviter les (mauvaises) surprises au moment de signer chez le notaire, il convient de décortiquer la méthode de calcul, de connaître les abattements pour durée de détention et de repérer les nombreuses exonérations possibles.
Qu’est-ce qu’une plus-value immobilière ?
Une plus-value immobilière est le bénéfice réalisé lors de la vente d’un bien :
Plus-value brute = prix de cession fiscal - prix d’acquisition corrigé
Seules les résidences principales totalement occupées par le propriétaire au jour de la vente échappent d’office à cet impôt. Les résidences secondaires, logements locatifs, terrains à bâtir ou parts de SCI entrent dans le champ d’application du régime.
Comment la plus-value est-elle calculée ?
1. Fixer le prix de cession fiscal
Prix du net vendeur inscrit dans l’acte authentique.
Ajout des éventuelles charges supportées par l’acheteur (clause de prise en charge d’agents chargés de trouver un acquéreur).
Déduction, le cas échéant, des frais de mainlevée d’hypothèque ou de libération d’occupants.
2. Déterminer le prix d’acquisition corrigé
Montant payé à l’achat (hors frais de prêt).
Frais d’acquisition notariés : vous choisissez soit leur montant réel (sur justificatifs), soit un forfait unique de 7,5 % du prix d’achat.
Travaux et agrandissements réalisés depuis l’achat : - Réels si factures d’entreprises (et s'ils relèvent de travaux de construction, reconstruction, agrandissement ou amélioration. Les simples travaux d'entretien ou de réparation ne sont pas déductibles). - Forfaitaire : + 15 % du prix d’achat si le bien est détenu depuis au moins cinq ans, même sans justificatifs.
Appliquer les abattement pour durée de détention
Le législateur distingue impôt sur le revenu (IR) et prélèvements sociaux :
Année de détention | Abattement IR | Abattement sociaux |
1 à 5 ans | 0 % | 0 % |
6 à 21 ans | 6 % par an | 1,65 par an |
22e année | 4 % | 1,60 % |
23 à 30 ans | Exonération totale | 9 % par an |
Au-delà de 30 ans | Exonération totale | Exonération totale |
Résultat : l’impôt sur le revenu disparaît après 22 ans, les prélèvements sociaux après 30 ans.
Quels biens sont exonérés automatiquement ?
Résidence principale
Le logement doit être la résidence effective et habituelle du vendeur jusqu’à la signature. Un déménagement est toléré dans la limite de douze mois si le bien reste inoccupé et mis en vente sans délai.
Vente inférieure à 15 000 €
Chaque vendeur bénéficie d’une franchise lorsque le prix de cession total (et non la plus-value) n’excède pas 15 000 €. En indivision, le seuil s’apprécie par quote-part.
Première cession d’un bien autre que la résidence principale
Vous êtes locataire de votre résidence principale ? La première vente d’un bien immobilier (résidence secondaire, locatif, etc.) peut être exonérée si :
1. Vous n’avez pas été propriétaire de votre résidence principale au cours des quatre années précédentes.
2. Vous réemployez tout ou partie du prix dans l’achat ou la construction de votre future résidence principale dans les vingt-quatre mois.
Expropriation, vente à un organisme de logement social, cession depuis plus de 30 ans…
Chaque cas répond à des critères et délais stricts ; un entretien en amont avec votre notaire ou un conseiller fiscal s’impose.
Autre cas d'exonération : les personnes âgées ou invalides aux revenus modestes peuvent bénéficier d'une exonération sous conditions de ressources et de non-imposition à l'IR.
Résidence principale ou secondaire : quel impact ?
Critère | Résidence principale | Résidence secondaire / Locatif |
Abattement automatique | 100 % dès la vente | Aucun avant 6 ans |
Justificatifs | Aucune durée minimale d’occupation, mais factures d’énergie / Internet probantes | Journal de location, relevés de loyers, factures de travaux |
Stratégie | Anticiper la date de déménagement pour conserver l’exonération | Arbitrer entre attendre la 6e, 22e ou 30e année ou réinvestir via l’exonération “première cession” |
Réduire la plus-value : trois stratégies concrètes
Choisir la bonne date de vente
Au-delà de 5 ans, l’abattement IR de 6 %/an devient puissant : attendre un an peut parfois effacer plusieurs milliers d’euros d’impôt.
Maximiser les travaux déductibles
Conservez toutes les factures (TVA, RGE ou non).
Les dépenses d’entretien (peinture, papier peint) et le mobilier n’ouvrent aucun droit à déduction.
Attention : si vous optez pour le forfait 15 %, vous ne pouvez plus ajouter les factures réelles.
Les travaux doivent relever de l'amélioration, pas de la simple maintenance.
Réemploi dans une nouvelle résidence principale
Utiliser la première cession d’un logement locatif pour financer l’achat de sa résidence principale permet une exonération totale, même après une courte durée de détention.
Justificatifs indispensables pour prouver les travaux
Facture au nom du vendeur, comportant adresse du bien, TVA, date et description précise.
Preuve de paiement (relevé bancaire, chèque encaissé).
Attestation décennale de l’entreprise (en cas de gros œuvre).
Sans ces pièces, l’administration fiscale peut reconstituer la plus-value et appliquer une majoration de 40 % pour manquement délibéré.
Qui calcule, qui prélève et quand ?
Rôle du notaire
1. Évalue la plus-value nette, en applique les abattements et déductions.
2. Prépare la déclaration 2048-IMM et prélève l’impôt directement sur le prix de vente.
3. Reverse le montant au Trésor public le mois suivant.
L’acheteur reçoit un prix net déjà amputé de la taxe ; le vendeur n’a aucune avance de trésorerie à faire.
Déclaration annuelle
Le notaire transmet l’information à la direction générale des Finances publiques. Le montant apparaît automatiquement sur la déclaration 2042 C, case 3VZ, pour contrôle ; aucun paiement supplémentaire n'est dû à ce stade, mais ce montant peut avoir un impact fiscal indirect (comme sur le revenu fiscal de référence ou certaines aides sociales).
La plus-value immobilière n’est pas une sanction fiscale : c’est un mécanisme encadré, avec ses règles, ses exceptions et ses marges de manœuvre. En connaissant les abattements liés à la durée de détention, les travaux réellement déductibles et les exonérations possibles, vous évitez de mauvaises surprises et vous reprenez la main sur la rentabilité réelle de votre vente.
Anticiper la fiscalité, c’est aussi vendre au bon moment, avec les bons justificatifs et ne rien laisser au hasard au moment de la signature chez le notaire. Ce n’est pas une option : c’est une stratégie.